Nourrir son âme | Julien Bouchard-Madrelle

Quand l’âme est affamée, il faut la contenter,

Lui trouver, ici-bas, un peu de nourriture,

De quoi la satisfaire et de quoi l’enchanter,

De quoi charmer un peu son ardente nature !

Car quoiqu’on puisse en dire, elle semble venir

D’un royaume inconnu plus lointain que la Chine,

Pays dont elle n’a pas gardé souvenir,

Pays d’Eternité et d’essence divine !

Viendrait-elle du Ciel plein d’astres scintillants,

D’où ces regards émus qu’on adresse aux étoiles,

D’où ces noms que l’on donne au sein du firmament

Viendrait-elle des monts, des flots mystérieux,

D’où notre attachement à la folle Nature

Et aux beautés du monde et à de certains lieux,

Attachement profond et clair comme l’eau pure ?

L’Âme, la Conscience, étincelant trésor,

Loge en nous qui, pourtant, sommes bien peu de chose,

Provoquant nos émois, nos doutes, nos transports ;

Elle est pour nous ce qu’est le parfum pour la rose !

Comme la chair, a-t-elle éphémère destin

Et les vers de l’oubli la font-ils disparaître,

Ou bien part elle un jour vers ce pays lointain

Plein d’or et de clartés où vont tous les ancêtres ?

L’Âme, flamme immortelle, enclose dans un corps,

Emprisonnée un temps dans un écrin fragile

Se sent bien à l’étroit – C’est là pourtant son sort ! –

Géant trop grand vivant sur bien trop petite île !

Comme Adam regrettant son paradis perdu,

L’oiseau en cage ayant souvenir qu’il fut libre,

Le naufragé guettant l’horizon, éperdu,

L’âme est nostalgique ! Violoncelle qui vibre !

La voilà prisonnière et pour la consoler

D’être loin de l’Eden ou elle était archange,

Où elle se grisait d’un bonheur envolé,

Il faut la contenter au mieux, devoir étrange…

Lui offrir de l’Amour, du Rêve, de l’Ardeur,

De la Gloire, de l’Art, des nectars, des extases,

Des levers de soleil, de l’Or, de la Grandeur,

De joyeux concerto, des banquets, des topazes,

Lui offrir tant et tant pour la ravir un peu :

La contemplation de la mer, des montagnes,

Les regards pleins de miel, les étreintes de feu,

Le parfum du muguet, les bulles de Champagne !

Nos désirs de conquête et de création

C’est l’âme qui en est la folle instigatrice ;

Pour oublier sa sombre insatisfaction,

Elle veut des frissons et des feux d’artifice !

Elle a dit à Colomb « Allons, vas voir plus loin ! »

Et au divin Schubert « Sois le double d’Orphée ! »

Et à Casanova « Sois tendre ! Aime avec soin ! »

Et puis à La Callas « Chante comme une fée ! »

Elle a dit à Pasteur « Cherche et trouve et guérit ! »

A Mère Theresa « Fait le bien sur la terre ! »

A Hugo, le titan « Fait qu’on pleure ou qu’on rit ! »

A Michelangelo « Donne vie à la pierre ! »

L’Âme a soif, l’Âme a faim de Beau et d’Idéal !

– Il faut nous enivrer nous a dit Baudelaire –

Elle veut la grand’ fête, elle veut le grand bal !

Elle veut plus d’Amour, de Joie et de Lumière !

Oui, il semble que l’âme ait besoin de cela

Avant que le néant, pour jamais ne l’éteigne,

Ou bien avant de voir un autre Walhalla

Où la joie éternelle est la seule qui règne !

Oui, il semble que l’âme ait besoin de cela

Pour supporter l’exil qu’est le monde pour Elle

Et la cage de chair où le sort la plaça

Afin d’imaginer qu’elle a toujours ses ailes !

Julien Bouchard-Madrelle – 27 juillet 2021

Facebook | https://www.facebook.com/groups/22007848273 | Ariane Mnouchkine & le Théâtre du Soleil

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